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La coca abordée sous un angle socioculturel


Comme nous l'avons vu dans la partie historique, la consommation de coca est fermement ancrée dans la culture sud-américaine, tant par son utilisation chez les premières civilisations que par son importance vitale quand il s'agit de lutter contre le mal des montagnes. L'interdiction de consommer cette plante est contradictoire avec les traditions millénaires qui donnent aux Indiens leur identité et représenterait un profond irrespect vis à vis de leur culture.

La coca est un élément moteur de la vie quotidienne des Indiens, ainsi elle accompagne toute activité rituelle. A l'image d'une tasse de thé, de café où d'un verre de vin dans la culture européenne, mâcher de la coca est une façon de « briser la glace » lors de rencontres professionnelles ou amicales car elle encourage à la convivialité. La coca suit les Indiens tout au long de leur vie. Avant d'accoucher, les femmes en prennent pour soulager la douleur et faciliter le travail en assurant une récupération rapide, le placenta sera ensuite brûlé avec de la coca séchée. Après la naissance des feuilles de coca sont mâchées par la famille et les amis des jeunes parents en guise de célébration. A l'âge de cinq ans on initie l'enfant à la chique mais il lui faudra attendre l'âge adulte pour le faire régulièrement. Les jeunes filles, quant à elles devront attendre le mariage pour consommer de la coca. Un jeune homme amoureux offre des feuilles au père de la jeune fille qu'il veut épouser. Quand vient l'heure de la mort, le mourant est encouragé à en mâcher pour partir en paix, aussi lors des veillées les feuilles sont la principale source de rafraichissement. On en place à l'intérieur du cercueil avant la la cérémonie de deuil. D'autre part, en guise de remerciements adressés à Mère Nature, la coutume veut que les plantations, les troupeaux, les canaux d'irrigations soient bénis lors de rituels impliquant l'utilisation de coca. On la trouve également dans des amulettes à qui confèrent protection à leur porteur. Les qualités attribuées à la coca sont la protection, la guérison, ainsi que des qualités spirituelles d'ordre sacré qui justifient que les restes de coca soient enterrés après mastication, par exemple dans un champs ou dans la cour d'une maison à qui ils conféreront sécurité, fertilité et bien être.

Dans le cadre de travaux collectifs, comme la construction d'une habitation, les propriétaires ont le devoir de fournir aux ouvriers de la coca pour soutenir leur travail et les remercier de leur solidarité.

Ces traditions sont malheureusement mises en péril par plusieurs facteurs. Les prix des feuilles augmentent tant que plus d'1,5 million de paysans boliviens ne peuvent plus se permettre d'en acheter, d'autre part on observe une baisse significative de la qualité des feuilles proposées sur le marché légal. C'est surtout la cocaïne qui donne une mauvaise image de la coca et la met en danger.

En effet, la cocaïne et sa fabrication nuisent fortement à la population. Ainsi les recherches conduites par l'institut de la santé suggèrent que les pisadores sont intoxiqués lors des heures passées dans les laboratoires de fortune où la cocaïne est extraite, entre autres à cause du contact prolongé avec le kérosène. Les opérations anti drogue des forces de l'ordre participent aussi à l'aggravation des violences dans les zones rurales où des armes sont utilisées par les trafiquants. Ces derniers payent leurs ouvriers clandestins avec de la pâte de coca non transformée qui présente de grands risques sanitaires. Le marché de la cocaïne est source de corruption chez les forces de l'ordre, les officiels et les militaires. La répression qui concerne les drogues retombe à tort et trop lourdement sur les paysans qui disposent de peu ou pas de pouvoir politique et économique.

Les traditions dans lesquelles s'inscrit la coca relèvent du domaine du sacré et ne peuvent pas être bafouées en réponse au trafic de drogues. La société indienne est consciente des problèmes posés par la cocaïne mais quelque soit la solution à ces désordres sociaux la Loi doit prendre en compte et respecter les usages traditionnels de la coca, qui ne sont en aucun cas responsables, ou liés, à l'usage de cocaïne.


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